Le Genévrier : symboles et traditions
- Leslie
- 23 déc. 2019
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Le Genévrier (Juniperus) est connu et reconnu comme remède universel depuis des temps très anciens, et comme toutes les plantes dont la réputation est incontestée, de nombreuses traditions plus ou moins magiques lui sont attachées.
Le Genévrier est un Conifère Spermaphyte Gymnosperme, apparu il y a 200 millions d’années. Il appartient à la famille des Cupressacées.
A l’inverse des autres conifères, le Genévrier n’est pas un résineux. En effet, malgré son odeur caractéristique, son bois ne possède pas de canaux résinifères.
Le Juniperus est communément désigné sous divers noms vernaculaires tels que Genévrier, Genevrat, Genavrire, Genévro, Genieuve, Genève, Genèbre, Gracil, Petiot, Petron, Peteron, Petrot ou encore Genibre.

On attribue au nom du Genévrier deux origines étymologiques :
- En latin, Juniperus évoquerait les mots « junior » (jeune) et « pario » (apparaître), en allusion à son action emménagogue
- En celte, « gen » viendrait de « buisson » et « prus » de « âcre », en allusion à la saveur de ses baies
La grande famille des Genévriers comporte une soixantaine de membres et d’innombrables cultivars.
Entre médecine et pouvoirs magiques
En Egypte, vers 1500 avant Jésus Christ (JC), les baies de Genévrier étaient couramment utilisées, soit macérées dans des huiles sous forme d’onguents ou de vins médicinaux, soit sous forme d’huile essentielle.
Hippocrate (460-370 avant JC) l’a utilisé en fumigations pour combattre la peste à Athènes.
Dioscoride (médecin, pharmacologue et botaniste grec) (40-90 après JC) utilisait le Genévrier pour « réchauffer, provoquer l’urine, combattre la toux, apaiser les enflures et tranchées du ventre, ainsi que contre les venins et les poisons ».
Les Romains en brûlaient sur la voie publique en temps d’épidémies, et ils en accrochaient aux portes pour éloigner les serpents.
Au Moyen Age et jusqu’au XIXème sièce, les fumigations de Genévrier étaient utilisées lors des grandes épidémies (Peste, Choléra, Variole), pour désinfecter l’air des maisons et des voies publiques. En 1870, les fumigations de Genévrier auraient permis d’endiguer l’épidémie de variole.
On utilisait les gales sur les aiguilles comme remède anti-coqueluche.
En différents lieux, on préparait un extrait mou de baie de Genièvre (dzïnvra dans le val d’Aoste, chaï dans les Alpes de Haute-Provence, Wachholder Latwerge en Suisse allemande) que l’on considérait comme stomachique, diurétique et désinfectant des voies urinaires.

En Allemagne, le « régime santé » du célèbre abbé Kneipp (1821-1897) conseille de faire des cures de baies de Genévrier sur une durée de 23 jours pour se maintenir en bonne santé et vivre longtemps.
Dans les années 1970, les Crétoises attribuaient leur fécondité à l’huile du Genévrier qu’elles obtenaient en enterrant un alambic rustique au-dessus duquel brûlait un grand feu pendant 3 jours.
Les alchimistes employaient du charbon de Genévrier pour chauffer leurs Alambics, car il a la vertu de brûler longtemps. Son bois est réputé imputrescible et son charbon, bien recouvert, pourrait garder le feu pendant 1 an. Les récipients de Genévrier se fonçaient, parait-il, quand leur contenu était empoisonné.
Les Grecs en faisaient don aux Erinyes (déesses de la vengeance) pour se les concilier.
Les Germains considéraient le Genévrier comme un arbre de vie, symbole de fertilité, de santé et de vie éternelle.
On accrochait une branche sur la porte des maisons pour en éloigner les serpents et protéger des sorcières. En effet, il est dit que celles-ci perdaient tous leurs pouvoirs tant qu’elles n’avaient pas compté la totalité des aiguilles de la branche.
On raconte également qu’il éloignerait les vaches et les chevaux des monstres qui les hantent.
Certains attribuaient au Genévrier un aspect démoniaque du fait qu’il pousse dans des endroits arides et qu’il soit si petit en comparaison des autres conifères habituellement plus grands.
Alimentation
Les anciens l’utilisaient pour fumer la viande, pratique indispensable à sa conservation avant l’arrivée des réfrigérateurs dans les foyers. D’autres avaient l’habitude de placer une branche de Genévrier au fond du trou creusé dans le jardin pour conserver les légumes. Ainsi, le Genévrier éloignait les rongeurs. L’odeur et probablement le piquant des aiguilles servaient à éloigner les rongeurs.
De nos jours, les baies de Genévrier sont la base de nombreuses eaux de vie apéritives et sont bien connues pour leur emploi culinaire dans les plats de viande à cuisson longue, comme la choucroute, dont elles facilitent la digestion.
Les Lapons boivent la décoction chaude des baies de Genévrier comme on boit du thé ou du café en Europe.

Les baies de Genévrier ou Genièvre, sont à la base de nombreuses eaux de vie, telles que le célèbre Gin des Anglais, Aquavit des Danois, Schiedam des Hollandais, Pécket des Belges, Borowitschka des Slaves, Gin des Anglais, Genièvre et Genivrette des Français et des Suisses romands.
Un symbole du Christianisme
Dans le jardin d’Eden, le Genévrier était l’arbre protecteur de la crèche. Pour les Chrétiens, la baie de Genièvre étant protégée par les feuilles piquantes de l’arbre, le Genévrier est symbole de chasteté, et pour certains auteurs, ses feuilles épineuses rappellent la passion du Christ et figure dans certaines représentations de la Nativité pour évoquer son destin. Une légende raconte même que durant leur fuite en Egypte, la vierge Marie et l’enfant Jésus se seraient dissimulés derrière un Genévrier pendant que passait l’armée du roi Hérode. Enfin, le bois de Genévrier aurait servi à sculpter la croix du sauveur.
En Toscane, on portait à l’église le Genévrier pour le faire bénir seulement au dimanche des palmiers.

Pour les Italiens de la Renaissance, le Genévrier symbolisait la chasteté, comme en témoigne le portrait réalisé par Léonard de Vinci, d’une jeune fille austère nommée Ginevra de Benci (« Guenièvre »), posant devant un Genévrier. Au dos du tableau figure une couronne de rameaux et la légende en latin « La beauté orne la vertu ».
Dans les Alpes, on faisait brûler une bûche de Genévrier après la messe de minuit à Noël, pour désinfecter et embaumer la maison (et repousser les mauvais esprits ?). D’ailleurs, le diction alpin « Saluer le Genévrier et s’agenouiller devant le Sureau » atteste du respect pour ces deux arbres.
Une légende dit que le Genévrier serait « le refuge des âmes qui ont quitté leur enveloppe corporelle ». Il pourrait les faire réincarner.
Au Tibet et en Ethiopie, le Genévrier est sacré : les Ethiopiens l’appellent « l’arbre de Dieu ».
Un bois imputrescible aux vertus purificatrices
Vers 560 avant JC, le bois de Genévrier fut choisi pour tailler les poutres du temple d’Artémis (déesse grecque de la chasse et de la nature sauvage) à Ephèse, l’une des merveilles du monde.
Les Gaulois l’utilisaient pour embaumer les têtes coupées et les Romains utilisaient l’huile de Cade (J. oxycedrus) pour laver les morts.
Dans l’Atlas marocain, le Genévrier est considéré comme un purificateur du sol, symbole de force et de sagesse.
Extrait de Monographie du Genévrier commun, Leslie Colin, Avril 2014. En consultation sur la page DOCUMENTS de ce site internet.
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